Le "charity business", version française
LE MONDE | 08.04.08 | 16h17 • Mis à jour le 08.04.08 |
On peut être près de ses sous et rêver néanmoins de soutenir des actions humanitaires. Il suffit désormais d'aiguiller ses achats sur des produits dont les bénéfices financent un programme ou une association. C'est ce qu'on appelle, dans les pays anglo-saxons, le charity business ou, en France, les "produits partage".
Ainsi, le programme (RED) lancé en 2006 par Bono, le chanteur de U2, et l'humanitaire Bobby Shriver fonctionne en partenariat avec des entreprises (Apple, Microsoft, Dell, Gap, Emporio Armani, American Express, Converse, Motorola et Hallmark) qui déclinent certains de leurs produits (tee-shirts, ordinateurs, téléphones...) en couleur rouge ("red"). "Les marques reversent 40 % du bénéfice brut réalisé sur ces objets au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Mais le consommateur les paie au même prix : son achat constitue un acte citoyen, et non un geste de charité", insiste Bobby Shriver.
Le programme, lancé principalement aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne - mais aussi dans soixante pays du monde, dont la France -, a permis d'ores et déjà de reverser 100 millions de dollars (63,6 millions d'euros) au Fonds mondial. Basé sur le même principe, le partenariat entre Volvic et l'Unicef a financé, en 2006, 3 milliards de litres d'eau potable en Afrique.
En restant chez soi, le site Internet Soliland.fr, partenaire de 300 enseignes et 40 associations, propose de télécharger un logiciel qui se déclenche automatiquement à chaque commande sur le site d'un des magasins affiliés. "Ces derniers nous versent une commission pour apparaître sur Soliland. La moitié de celle-ci est affectée à l'association choisie par le consommateur", explique Matthieu Saint-Girons, directeur de Soliland, qui revendique 5 000 internautes inscrits depuis décembre. L'homologue américain du site iGive.com ("Je donne"), lancé dès 1997, a récolté à ce jour plus de 3 millions de dollars (1,9 million d'euros).
Si on ne veut vraiment rien débourser : rendez-vous sur Veosearch.fr (les Américains utilisent goodsearch.com depuis fin 2005). Créé en octobre 2007 par deux jeunes diplômés de l'école des Hautes études commerciales (HEC) engagés dans l'humanitaire, le site redirige sur le moteur de son choix, par exemple Google ou Yahoo. En passant par ce canal, chaque recherche permet de collecter des fonds pour une association. Le tout financé par la publicité. Veosearch revendique près de 14 millions de recherches, 26 000 inscrits et plus de 20 000 euros récoltés.
Les associations développent d'ailleurs elles-mêmes ce type de subvention. La Croix-Rouge et Action contre la faim ont ainsi mis en place un partenariat direct avec le site d'e-commerce Price-Minister. "Lancé en 2001-2002, il nous permet de recueillir aujourd'hui environ 2 500 euros par mois", indique Nicole Fourne, responsable des partenariats. Et Véronique Daher, directrice de la communication et du développement d'Action contre la faim, d'argumenter : "Ce mode de financement ne rapporte pas énormément d'argent, mais il rajeunit le profil des donateurs." Michel Kazatchkine, directeur général du Fonds mondial de lutte contre le sida - qui reçoit les contributions de (RED) - est catégorique : "Les apports du secteur privé sont essentiels à l'éradication du virus : sans eux, nous n'arriverons à rien."
Quant aux entreprises, elles n'en retirent pas seulement un bénéfice d'image. "Quand je fais mes courses, je choisis les magasins de Soliland, par exemple Amazon, plutôt que la Fnac... et pour acheter mon frigo, j'ai découvert ainsi une enseigne que je ne connaissais pas", s'enthousiasme Catherine, 57 ans, adepte du site.
David Clifton, directeur marketing de Dell Consumer Europe, le confirme : "Nos ordinateurs et nos imprimantes de la gamme (RED) ont permis d'augmenter sensiblement nos ventes et de toucher des cibles de clientèle plus larges." Quand le marketing joue les bonnes actions...
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Renseignements :
www.soliland.fr ;
www.veosearch.fr ;
www.joinred.com.Marie Zawisza
Article paru dans l'édition du 09.04.08.